Dans l’une des salles d’interrogatoire de la prison de la Loubianka à Moscou, l’un des officiers du NKVD feuilletait soigneusement un passeport diplomatique à l’effigie de l’Etat suédois. C’était celui de Raoul Wallenberg.
Il avait parcouru les quelques pages du document, puis s’était tourné de nouveau vers le diplomate suédois.
- Quand exactement êtes-vous arrivé à Budapest ?
- Le 9 juillet 1944, avait répondu très calmement le diplomate suédois.
- Quelle était votre mission dans la capitale hongroise ? avait demandé l’officier du NKVD sur un ton glacial.
- Il s’agissait de préserver les populations juives hongroises de la déportation et de l’extermination.
- C’était une mission financée et commanditée par les Américains? avait surenchéri le Russe.
- J’agissais au nom de mon gouvernement. Mes instructions venaient du ministère suédois des Affaires étrangères. Je n’ai rien de plus à ajouter! avait rétorqué Raoul.
- Et vous ne receviez vraiment aucune instruction de Washington ? avait insisté l’officier du corps de la Sécurité d’Etat soviétique.
- Strictement aucune.
- Vous avez diffusé des milliers de passeports à des ressortissants hongrois, vous étiez sûr de leur légalité internationale ?
L’officier du NKVD avait alors fouillé dans le tiroir du bureau et sorti plusieurs passeports de protection qu’il avait examiné avec une certaine attention.
- Le but était de sauver le plus possible d’êtres humains, au-delà des aspects de la légalité internationale des passeports. Leur objet, je vous le répète, était de lutter contre l’extermination des Juifs par les nazis.
- Nous vous connaissons Wallenberg. Vous appartenez à une famille de grands capitalistes. Vous êtes un espion, lui avait lancé l’un des Russes.
- Je suis un diplomate de la légation de Suède à Budapest! avait répété le Suédois.
- Vous êtes un espion! Avouez donc que vous avez mené une mission d’espionnage à la solde des Américains! avait répété l’officier russe.
Raoul Wallenberg et son chauffeur Vilmos Langfelder disparurent à jamais. Plus tard, les autorités russes déclarèrent que le diplomate suédois était décédé d’une crise cardiaque en 1947...
Préface de M. Per Anger ancien ambassadeur de Suède au Canada.